Milly Bregnard honorée par la Commune

Hervé Gullotti, maire :

Mme le maire, chère Milly,
Chère famille, Chers invités,
Mesdames, Messieurs,

J’ai le plaisir de vous accueillir au nom des autorités communales pour ce moment particulier, émouvant, solennel et festif, à la fois, dédié à toi Milly.

Les années passent, mais les souvenirs des grandes actions demeurent dans les esprits.

Le 31 décembre 2014 tu as quitté la Mairie de Tramelan, après douze années passées à occuper le siège de maire, douze années passées à réaliser l’une des choses que tu sais le mieux accomplir : te soucier des Autres et agir pour le bien de la collectivité publique. Tu a mis ainsi un terme à une vie politique intense et bien remplie qui t’as notamment vue prendre la présidence du Conseil général en 2000, 2^e femme à occuper cette charge. Trois ans après, tu as accédé à la Mairie. C’est la première fois qu’une femme incarnait ce poste politique à responsabilités. Auparavant tu avais assumé des mandats politiques dans d’autres organes communaux, expériences qui t’ont forgé l’amplitude nécessaire pour être élue sans coup férir à la Mairie sans passer par la case « conseillère municipale ».

En 2002, tu avais presque atteint l’âge te donnant droit à une rente AVS. Certainement que tu n’aspirais pas à passer une retraite comme tout un chacun. Il fallait un nouveau défi et tu la relevé avec bravoure, engagement et humilité. Merci au passage à Maurice d’avoir accepté d’être le Prince Consort durant toutes ces années et soutenu Milly dans son intense activité.

Même si aujourd’hui l’égalité ne s’est pas encore emparée de manière pérenne et satisfaisante de la vie politique locale, à l’époque tu as montré le chemin à nombre de femmes qui se sont depuis engagées en politique. Le Conseil général et le Conseil municipal ne sont pas encore composés d’une majorité de femmes, mais les temps changent. Et qui sait lorsque les hommes ne souhaiteront plus travailler qu’à temps partiel, et que cette posture sera considérée comme une bonne attitude par la société, là les choses changeront.

Ton chemin à la tête de l’Exécutif communal n’est pas resté dans l’ombre de trois législatures mornes et vouées à l’oubli. Tu es en effet à la source et a permis de nombreuses réalisations qui ont marqué le paysage local et régional. Dans un ordre aléatoire : l’Agenda 21, la création d’un Centre médical, l’implantation du ceff COMMERCE à Tramelan, l’Espace DEFI I qui est sorti de terre en une année éclair, le chemin des stèles en la mémoire d’Albert Gobat, créations artistiques sur le thème de la paix qui jalonnent le Chemin Devant-Ville, la Semaine Virgile Rossel en la mémoire de cet autre illustre Tramelot.

Aujourd’hui, à la veille d’un si beau jour, ton 83^e anniversaire, tu es la seconde citoyenne de la cité à recevoir le droit de cité d’honneur. Tu l’avais toi-même accordé, avec le Conseil municipal, en 2007 à Roland Stähli, autre personnalité qui est inscrite dans l’histoire de Tramelan et bien au-delà de nos frontières.

C’est donc très fier et reconnaissant que celui que tu avais engagé en 2005 en tant que chancelier te remets aujourd’hui ce droit de cité d’honneur, qui selon la Loi, est remis à une personne (je cite) « qui a rendu des services particuliers à la communauté » et t’accorde les mêmes droits que ceux acquis par une procédure ordinaire.

Rassure-toi, tu garderas ton lieu d’origine cher à ton cœur, Bonfol, à côté duquel vient se greffer celui de Tramelan, pas Tramelan-Dessous, ni Tramelan-Dessus, mais Tramelan, cité pour laquelle tu as tellement œuvré.

Merci Milly

Hommage du Conseil municipal, texte de Christophe Gagnebin lu par André Ducommun :

Mesdames, Messieurs,
Chère Milly,

En ce 22 octobre 2023, pour la deuxième fois de son histoire, la Municipalité de Tramelan décerne à une personnalité marquante la citoyenneté d’honneur. Elle entend ainsi lui témoigner sa vive reconnaissance, son admiration aussi, pour les immenses services rendus à la communauté. C’est aujourd’hui à Milly Bregnard qu’un hommage est rendu, première femme à avoir accédé à la mairie de Tramelan, tâche qu’elle a assumée avec dévouement et talent durant 12 ans.

Milly… Un prénom un peu rare qui, pour les littéraires, évoque Lamartine le romantique ou Cocteau, le père des enfants terribles. Pour les Tramelotes et les Tramelots, en revanche, Milly, « la Milly » comme ils aiment à l’appeler affectueusement, c’est d’abord cette femme qui a grandi au milieu d’eux, qu’ils ont côtoyée au quotidien, avec qui ils ont tant de choses en partage et à qui, un dimanche de novembre, ils ont confié leur destin.

Milly Bregnard est une enfant de Tramelan. L’essentiel de sa vie s’est déroulé dans ce haut-vallon, dans cette cité un peu à part dont elle connait chaque recoin, et presque chaque visage. Elle est d’ici, et rien de ce qui concerne ce coin de pays ne lui est indifférent. C’est pourquoi elle s’est, durant toute sa vie, engagée, à divers titres, dans la vie associative et culturelle locale. Elle le sait bien : c’est au contact des autres que l’Homme s’enrichit, c’est parce qu’il est à l’écoute de son prochain qu’il est grand, parce qu’il sait, quand le besoin s’en fait sentir, lui apporter son soutien et lui témoigner son amitié. Et c’est pourquoi aussi la culture tient une place importante dans son cœur : car c’est elle qui, comme le disait André Malraux, fait de l’Homme autre chose qu’un accident de l’histoire. Milly Bregnard en a une conception qui refuse tout élitisme : la culture ne saurait être l’apanage de quelques-uns. Bien au contraire, la culture, active encore plus que passive, abolit les clivages sociaux, rapproche les humains, leur permet de transcender les obstacles et les différences qu’ils s’ingénient parfois à dresser entre eux, leur offre la chance d’exprimer leurs aspirations les plus nobles. Enfin la culture, pour Milly, c’est d’abord, et peut-être surtout, un plaisir.

Et puis, Milly Bregnard appartient à cette génération de femmes qui a dû conquérir de haute lutte l’exercice des droits civiques et civils. Qu’il parait loin le temps où la politique était la chasse gardée des hommes, qu’ils paraissent anachroniques déjà les arguments de ceux qui, il y a à peine plus cinquante ans, cherchaient encore à démontrer les risques que le suffrage féminin ferait courir à la société helvétique. Et combien elles prêtent à sourire aujourd’hui, ces caricatures qui représentaient la femme politique sous les traits d’une sorcière ou d’une sorte de dragon munie d’un tape-tapis….

Et pourtant, en ce début du 3^ème millénaire, l’élection d’une femme à la mairie d’une commune de grande taille n’est pas encore une évidence. Dans le message de gratitude que, au lendemain de son élection, elle adresse à ses concitoyennes et concitoyens, Milly semble s’en étonner elle-même : « Une femme… » s’exclame-t-elle… « Qui l’eût dit ? Qui l’eût cru ? »

Et, de fait, les femmes – il est bon de le rappeler en cette période électorale – n’occupent toujours pas, alors que ce siècle est vieux déjà de deux décennies, la place qui devrait leur revenir sur la scène politique. Ni dans le monde, ni en Suisse, ni même, doit-on constater avec tristesse, à Tramelan. Et les injustices demeurent plus criantes encore dans le monde du travail, en matière salariale notamment.

C’est pourquoi il est bon que soit honorée en ce jour une femme, issue du monde du travail et que rien ne semblait prédestiner à cette fonction, une femme qui a osé faire acte de candidature, a été élue, a su s’imposer dans ce monde politique aux valeurs parfois si patriarcales encore, une femme qui a présidé avec brio, durant trois législatures, aux destinées de sa commune, douze ans qui, dans la mémoire des Tramelotes et des Tramelots, demeurent un temps heureux.

Enfin, Milly a su incarner la politique au sens le plus noble du terme. Celle qui ne recherche ni la gloire, ni le pouvoir, celle qui n’affiche d’autre volonté que de servir, celle qui est disponibilité et abnégation.

La politique est d’abord valeurs : Milly sait défendre celles qui l’animent. Sans étroitesse d’esprit, mais avec conviction. « Sociale du fond du cœur » : ce fut l’un des slogans de sa campagne, mais ce fut aussi un esprit qui l’aura animée tout au long de ces douze années passées à la mairie.

La politique est vision. C’est sous la direction de Milly Bregnard que Tramelan, avant bien d’autres communes, s’est dotée d’un Agenda 21, reconnaissant qu’il ne pouvait y avoir de développement industriel qui ne fût aussi social et écologique, et qu’il ne pouvait exister de politique durable qu’à condition de savoir concilier ces trois pôles.

La politique est aussi discours. Nous vivons dans une région qui se méfie des mots, prompte à y voir des effets rhétoriques gratuits. Et pourtant : la politique est dialogue, elle est vision, force de conviction. Milly Bregnard a rédigé de nombreuses allocutions tout au long de son activité politique. Elle a su le faire avec simplicité, chaleur. Elle a su, avec des paroles finement ciselées, emporter bien souvent l’adhésion de ses auditeurs, sachant s’adresser tant à leur raison qu’à leur sensibilité.

La politique est surtout action. Ce mandat de mairesse, Milly Bregnard l’a empoigné d’emblée à bras le corps, favorisant partout les initiatives, s’enthousiasmant pour les projets les plus divers, travaillant sans relâche à les réaliser tous. Aujourd’hui encore, nombreuses sont les réalisations que les Tramelotes et les Tramelots rattachent au règne de Milly Bregnard.

La politique est enfin don de soi. Don de son temps, don de son énergie, don de sa personne. Il faut prendre des coups, encaisser des critiques, subir la virulence de certains mécontents. Milly Bregnard a su le faire avec dignité, grandeur d’âme, répondant avec un sourire à ses détracteurs, prodiguant un mot d’encouragement à ses collaborateurs et tournant résolument le regard vers l’avenir. Car il faut que vogue le navire… par gros temps encore plus que par mer calme.

A l’heure où les ténèbres des populismes et de la démagogie menacent partout la lumière de la démocratie, à l’heure de la post-vérité et des invectives anonymes sur les réseaux sociaux, à l’heure où le fossé se creuse entre la politique spectacle et les citoyens qui s’en détournent, sans doute est-ce un bien beau privilège, pour la Commune de Tramelan, que de pouvoir rendre hommage aujourd’hui à une femme de la trempe de Milly Bregnard.

Merci donc à Milly Bregnard pour le soin qu’elle a pris de Tramelan, merci à elle pour la vie qu’elle a su insuffler à sa cité, merci aussi pour la confiance qu’elle nous invite, femmes et hommes de ce coin de terre, à placer dans l’avenir.